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LA REINE MARGOT.

— Voyons, il le faut bien, puisque vous ne croyez pas la commission exécutable sans cela.

Et Catherine, en haussant les épaules, déroula le parchemin d’une main, et de l’autre écrivit : mort ou vif.

— Tenez, dit-elle, trouvez-vous l’ordre suffisamment en règle, maintenant ?

— Oui, Madame, répondit Maurevel ; mais je prie Votre Majesté de me laisser l’entière disposition de l’entreprise.

— En quoi ce que j’ai dit nuit-il donc à son exécution ?

— Votre Majesté m’a dit de prendre douze hommes ?

— Oui ; pour être plus sûr…

— Eh bien ! je demanderais la permission de n’en prendre que six.

— Pourquoi cela ?

— Parce que, Madame, s’il arrivait malheur au prince, comme la chose est probable, on excuserait facilement six hommes d’avoir eu peur de manquer un prisonnier, tandis que personne n’excuserait douze gardes de n’avoir pas laissé tuer la moitié de leurs camarades avant de porter la main sur une Majesté.

— Belle Majesté, ma foi ! qui n’a pas de royaume.

— Madame, dit Maurevel, ce n’est pas le royaume qui fait le roi, c’est la naissance.

— Eh bien donc, dit Catherine, faites comme il vous plaira. Seulement, je dois vous prévenir que je désire que vous ne quittiez point le Louvre.

— Mais, Madame, pour réunir mes hommes ?

— Vous avez bien une espèce de sergent que vous puissiez charger de ce soin ?

— J’ai mon laquais, qui non-seulement est un garçon fidèle, mais qui même m’a quelquefois aidé dans ces sortes d’entreprises.

— Envoyez-le chercher, et concertez-vous avec lui. Vous connaissez le cabinet des Armes du roi, n’est-ce pas ? eh bien ! on va vous servir là à déjeuner ; là vous donnerez vos ordres. Le lieu raffermira vos sens s’ils étaient ébranlés. Puis, quand mon fils reviendra de la chasse, vous passerez dans mon oratoire, où vous attendrez l’heure.

— Mais comment entrerons-nous dans la chambre ? Le roi a sans doute quelque soupçon, et il s’enfermera en dedans.

— J’ai une double clef de toutes les portes, dit Catherine,