Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/196

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Rosa le regarda avec une douce compassion, elle sentait que ce qu’elle voulait était au-dessus des forces de cet homme, et qu’il fallait accepter celui-là avec sa faiblesse.

— Oui, dit-elle, vous aviez deviné juste, le prétendant, l’amoureux, le Jacob ne venait pas pour moi.

— Et pour qui venait-il donc ? demanda Cornélius avec anxiété.

— Il venait pour la tulipe.

— Oh ! fit Cornélius pâlissant à cette nouvelle plus qu’il n’avait pâli lorsque Rosa, se trompant, lui avait annoncé quinze jours auparavant que Jacob venait pour elle.

Rosa vit cette terreur, et Cornélius s’aperçut à l’expression de son visage qu’elle pensait ce que nous venons de dire.

— Oh ! pardonnez-moi, Rosa, dit-il, je vous connais, je sais la bonté et l’honnêteté de votre cœur. Vous, Dieu vous a donné la pensée, le jugement, la force et le mouvement pour vous défendre, mais à ma pauvre tulipe menacée, Dieu n’a rien donné de tout cela.

Rosa ne répondit point à cette excuse du prisonnier et continua :

— Du moment où cet homme, qui m’avait suivie au jardin et que j’avais reconnu pour Jacob, vous inquiétait, il m’inquiétait bien plus encore. Je fis donc ce que vous aviez dit, le lendemain du jour où je vous ai vu pour la dernière fois et où vous m’aviez dit…

Cornélius l’interrompit.

— Pardon, encore une fois, Rosa, s’écria-t-il. Ce que je vous ai dit, j’ai eu tort de vous le dire. — J’en ai déjà demandé mon pardon de cette fatale parole. Je le demande encore. Sera-ce donc toujours vainement ?