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Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/83

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neille à son frère, sans que Corneille le moins du monde en eût laissé soupçonner l’importance politique à son filleul.

La seule recommandation qu’il lui eût faite était de ne rendre ce dépôt qu’à lui, sur un mot de lui, quelle que fût la personne qui vînt le réclamer.

Et Cornélius, comme nous l’avons vu, avait enfermé le dépôt dans l’armoire aux caïeux rares.

Puis, le Ruart parti, le bruit et les feux éteints, notre homme n’avait plus songé à ce paquet, auquel au contraire songeait fort Boxtel, qui, pareil au pilote habile, voyait dans ce paquet le nuage lointain et imperceptible qui grandira en marchant, et qui renferme l’orage.

Et maintenant, voilà donc tous les jalons de notre histoire plantés dans cette grasse terre qui s’étend de Dordrecht à la Haye. Les suivra qui voudra, dans l’avenir des chapitres suivants ; quant à nous, nous avons tenu notre parole, en prouvant que jamais ni Corneille ni Jean de Witt n’avaient eu si féroces ennemis dans toute la Hollande que celui que possédait van Baerle dans son voisin mynheer Isaac Boxtel.

Toutefois, florissant dans son ignorance, le tulipier avait fait son chemin vers le but proposé par la société de Harlem : il avait passé de la tulipe bistre à la tulipe café brûlé ; et revenant à lui, ce même jour où se passait à la Haye le grand événement que nous avons raconté, nous allons le retrouver vers une heure de l’après-midi, enlevant de sa plate-bande les oignons, infructueux encore, d’une semence de tulipes café brûlé, tulipes dont la floraison avortée jusque-là était fixée au printemps de l’année 1673,