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PHILOSOPHIE CHIMIQUE.

toires merveilleuses dont on s’est plu à le faire le héros ; vous n’y apprendrez rien au sujet de la tête d’airain parlante, qu’il aurait fabriquée, et qu’il consultait, dit-on, à l’occasion.

Mais il ne vous sera pas difficile de comprendre pourquoi Roger Bacon a passé pour sorcier, si vous lisez son traité De mirabili potestate artis et naturæ. Il exagère tant cette puissance de l’art et de la nature, que vous pouvez vous figurer, avec un peu de bonne volonté, qu’il a connu l’art de s’élever et de se diriger dans les airs, aussi bien que la cloche du plongeur, les ponts suspendus, le microscope, le télescope, et les voitures ou bateaux à vapeur ; car c’est tout au plus si ces merveilles de notre âge réalisent tous les effets qu’il dit pouvoir être obtenus de son temps.

Ces assertions d’un esprit exagéré et crédule laissent beaucoup de doute sur les connaissances que Roger Bacon a pu avoir en ce qui concerne la poudre à canon. Voici sa recette : Sed tamen salis petræ Luru vopo vir can utriet sulphuris, et sic facies tonitrum et corruscationem, si scias artificium. Comme on voit, le charbon et les doses y seraient désignés d’une manière énigmatique ; et, quand il ajoute qu’avec une portion de ce mélange de la grosseur du pouce on peut détruire une armée et bouleverser une ville, on serait tenté de croire qu’il n’avait