Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/248

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était brisée, mais en suivant à pied les rives. Il marcha ainsi cinq jours encore, et il se trouva sur les bords du lac Ontario ; puis, le traversant à York, il eut bientôt gagné le lac Huron, où était son wigwam ; mais, en son absence, de grands événements étaient arrivés.

« Les Anglais, à force de repousser devant eux les peaux rouges, étaient parvenus peu à peu jusqu’aux bords du lac Supérieur : le Serpent-Noir trouva son village habité par des visages pâles et sa place prise par des étrangers au foyer de ses ancêtres.

« Alors il se retira dans les montagnes où l’Otalawa prend sa source, et appela ses jeunes guerriers : ils déterrèrent le tomahawk et accoururent autour de lui, aussi nombreux que l’étaient les élans et les daims avant que les visages pâles eussent paru aux sources de la Delawarre et du Susquehennah. Alors les visages pâles eurent peur, et ils envoyèrent au nom du gouverneur une ambassade au Serpent-Noir. On lui offrait six fusils, deux barils de poudre et cinquante bouteilles d’eau-de-feu, s’il voulait vendre le toit de ses pères et le champ de ses aïeux ; et en échange de ce toit et de ces champs, on lui donnait la terre des Mosquitos, qui venait d’être cédée par la république de Guatimala aux visages pâles. Le Serpent-Noir résista longtemps, quelques tentantes que fussent ces offres ; mais il eut le malheur de goûter à l’eau-de-feu, et dès lors tout fut perdu : il consentit au traité et l’échange fut fait. Le Serpent-Noir jeta une pierre derrière son dos, en disant :

« — Que le Manitou me jette loin de lui comme je