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Page:Dumas - Le Caucase, 1859.djvu/157

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15 centimes le Numéro
5 Mai 1859
No 20

LE CAUCASE
JOURNAL DE VOYAGES ET ROMANS
PARAISSANT TOUS LES JOURS

Nous commençons notre publication par le voyage d’ALEXANDRE DUMAS au Caucase.
Cette première publication de notre Journal, entièrement inédite, sera complète en trente numéros pour lesquels on s’abonne chez Jaccottet, rue Lepelletier, 31, et pour la vente, chez Delavier, rue Notre-Dame-des-Victoires, 11.

CHAPITRE XL.

Les bains persans.

Toute la journée Finot nous avait dit qu’il nous ménageait une surprise pour le soir.

La nouvelle que je venais d’apprendre de la mort de la comtesse Rostopchine me rendait peu curieux de surprises, et j’eusse mieux aimé les garder pour un autre jour.

Mais je n’étais pas seul et laissai Finot maître du reste de ma soirée ; nous montâmes en drosky.

— Au bain, dit-il en russe.

Je savais assez de russe pour comprendre ce que Finot venait de dire.

— Au bain ? lui demandai-je, nous allons au bain ?

— Oui, me répondit-il, avez-vous quelque chose contre ?

— Contre les bains ? pour qui me prenez-vous ? Seulement, vous m’avez parlé d’une surprise, et je trouve assez impertinent que vous trouviez que c’est une surprise pour moi d’aller au bain.

— Connaissez-vous les bains persans ?

— De réputation.

— En avez-vous pris jamais ?

— Non.

— Eh bien, voilà où est la surprise.

Nous échangions ces paroles en allant comme le vent dans les rues plus que accidentées de Tiflis, qui ne sont éclairées que par les lanternes des faiseurs de whist attardés, rentrant chez eux.

Pendant mon séjour de six semaines à Tiflis, j’ai vu à peu près quinze personnes ou boitant ou portant leurs bras en