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15 centimes le Numéro
18 Avril 1859
No 3

LE CAUCASE
JOURNAL DE VOYAGES ET ROMANS
PARAISSANT TOUS LES JOURS

Nous commençons notre publication par le voyage d’ALEXANDRE DUMAS au Caucase.
Cet ouvrage, entièrement inédit, sera complet en trente numéros pour lesquels on peut s’abonner à l’avance.
En vente chez Delavier, rue Notre-Dame-des-Victoires, 11

tions, que nous avait faites la veille madame Polnobokoff, nous furent renouvelées avec surcroît d’insistance ; ce qui amena ces dames à nous dire que, comme elles ne voulaient point nous retarder, elles nous donnaient congé.

Il s’agissait surtout de traverser de jour le bois de Schoukovaïa.

Ce malheureux bois de Schoukovaïa était la préoccupation de tout le monde.

Nous commençâmes à nous en préoccuper comme les autres, et prîmes congé de nos charmantes hôtesses, qui voulurent nous mettre en voiture.

En conséquence, elles nous accompagnèrent jusqu’au perron.

Nous montâmes dans notre tarantasse ; la maîtresse de police regardait avec inquiétude : — notre escorte de six Cosaques ne paraissait pas la rassurer.

— Quelque chose vous préoccupe, madame ? lui demandai-je.

— Oui, — me répondit-elle, — est-ce que vous n’avez pas d’autres armes que vos kangiars ?

Je relevai une couverture jetée sur la banquette de devant, et mis à jour trois fusils à deux coups, deux carabines, dont une à balles explosibles, et un revolver.

— Oh ! bien, dit-elle ; seulement sortez de la ville avec vos fusils à la main, afin que l’on voie que vous êtes armés. Parmi ces gens qui vous regardent, — il s’était en effet formé un cercle autour de nous, — parmi ces gens qui vous regardent, il y a peut-être deux ou trois espions des Tatars.

Nous suivîmes le conseil qui nous était si fraternellement donné ; nous appuyâmes chacun la crosse d’un fusil à deux coups sur notre genou ; nous prîmes congé de ces dames et sortîmes de Kisslarr dans cette formidable attitude, au milieu