Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/158

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étonnement, en effet, vous me paraissez bien instruit.

— Eh ! mon Dieu, la chose est toute simple ; vous autres, qui tenez le pouvoir, vous n’avez que les moyens que donne l’argent ; nous autres, qui l’attendons, nous avons ceux que donne le dévouement.

— Le dévouement ? dit Villefort en riant.

— Oui, le dévouement ; c’est ainsi qu’on appelle en termes honnêtes l’ambition qui espère.

Et le père de Villefort étendit lui-même la main vers le cordon de la sonnette pour appeler le domestique que n’appelait pas son fils.

Villefort lui arrêta le bras.

— Attendez, mon père, dit le jeune homme, encore un mot.

— Dites.

— Si mal faite que soit la police royaliste, elle sait cependant une chose terrible.

— Laquelle ?

— C’est le signalement de l’homme qui, le matin du jour où a disparu le général Quesnel, s’est présenté chez lui.

— Ah ! elle sait cela, cette bonne police ? et ce signalement, quel est-il ?

— Teint brun, cheveux, favoris et yeux noirs, redingote bleue boutonnée jusqu’au menton, rosette d’officier de la Légion d’honneur à la boutonnière, chapeau à larges bords et canne de jonc.

— Ah ! ah ! elle sait cela ? dit Noirtier, et pourquoi donc en ce cas n’a-t-elle pas mis la main sur cet homme ?

— Parce qu’elle l’a perdu hier ou avant-hier au coin de la rue Coq-Héron.

— Quand je vous disais que votre police était une sotte ?