Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/291

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médiocre de maître Pastrini. Ils le lui dirent tout franchement, et il reçut leurs excuses en homme qui appréciait leur délicatesse.

Albert était ravi des manières du comte, que sa science seule l’empêchait de reconnaître pour un véritable gentilhomme. La liberté de disposer entièrement de la voiture le comblait surtout de joie : il avait ses vues sur ses gracieuses paysannes ; et, comme elles lui étaient apparues la veille dans une voiture fort élégante, il n’était pas fâché de continuer à paraître sur ce point avec elles sur un pied d’égalité.

À une heure et demie, les deux jeunes gens descendirent ; le cocher et les laquais avaient eu l’idée de mettre leurs habits de livrées sur leurs peaux de bêtes, ce qui leur donnait une tournure encore plus grotesque que la veille, et ce qui leur valut tous les compliments de Franz et d’Albert.

Albert avait attaché sentimentalement son bouquet de violettes fanées à sa boutonnière.

Au premier son de la cloche, ils partirent et se précipitèrent dans la rue du Cours par la via Vittoria.

Au second tour, un bouquet de violettes fraîches, parti d’une calèche chargée de paillassines, et qui vint tomber dans la calèche du comte, indiqua à Albert que, comme lui et son ami, les paysannes de la veille avaient changé de costume, et que, soit par hasard, soit par un sentiment pareil à celui qui l’avait fait agir, tandis qu’il avait galamment pris leur costume, elles, de leur côté, avaient pris le sien.

Albert mit le bouquet frais à la place de l’autre, mais il garda le bouquet fané dans sa main ; et, quand il croisa de nouveau la calèche, il le porta amoureusement à ses lèvres : action qui parut récréer beaucoup non seulement