Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/212

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l’acquéreur du potager, après l’avoir parfaitement payé, ne put trouver à le revendre la somme qu’il en voulait, et, en attendant une hausse de prix qui ne peut manquer, un jour ou l’autre, de l’indemniser bien au-delà de ses pertes passées et de son capital au repos, il se contenta de louer cet enclos à des maraîchers, moyennant la somme de cinq cents francs par an.

C’est de l’argent placé à un demi pour cent, ce qui n’est pas cher par le temps qui court, où il y a tant de gens qui le placent à cinquante, et qui trouvent encore que l’argent est d’un bien pauvre rapport.

Néanmoins, comme nous l’avons dit, la grille du jardin, qui autrefois donnait sur le potager, est condamnée, et la rouille ronge ses gonds ; il y a même plus : pour que d’ignobles maraîchers ne souillent pas de leurs regards vulgaires l’intérieur de l’enclos aristocratique, une cloison de planches est appliquée aux barreaux jusqu’à la hauteur de six pieds. Il est vrai que les planches ne sont pas si jointes qu’on ne puisse glisser un regard furtif dans les intervalles ; mais cette maison est une maison sévère, et qui ne craint point les indiscrétions.

Dans ce potager, au lieu de choux, de carottes, de radis, de pois et de melons, poussent de grandes luzernes, seule culture qui annonce que l’on songe encore à ce lieu abandonné. Une petite porte basse s’ouvrant sur la rue projetée, donne entrée en ce terrain clos de murs, que ses locataires viennent d’abandonner à cause de sa stérilité et qui, depuis huit jours, au lieu de rapporter un demi pour cent comme par le passé, ne rapporte plus rien du tout.

Du côté de l’hôtel, les marronniers dont nous avons parlé couronnent la muraille, ce qui n’empêche pas