Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/283

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— Fort bien, monsieur, répondit vivement Danglars ; elle fait en ce moment de la musique dans son petit salon avec M. Cavalcanti.

Albert conserva son air calme et indifférent : peut-être éprouvait-il quelque dépit intérieur ; mais il sentait le regard de Monte-Cristo fixé sur lui.

— M. Cavalcanti a une très belle voix de ténor, dit-il, et mademoiselle Eugénie un magnifique soprano, sans compter qu’elle joue du piano comme Thalberg. Ce doit être un charmant concert.

— Le fait est, dit Danglars, qu’ils s’accordent à merveille.

Albert parut n’avoir pas remarqué cette équivoque, si grossière, cependant, que madame Danglars en rougit.

— Moi aussi, continua le jeune homme, je suis musicien, à ce que disent mes maîtres, du moins ; eh bien ! chose étrange, je n’ai jamais pu encore accorder ma voix avec aucune voix, et avec les voix de soprano surtout encore moins qu’avec les autres.

Danglars eut un petit sourire qui signifiait :

— Mais fâche-toi donc ! Aussi, dit-il, espérant sans doute arriver au but qu’il désirait, le prince et ma fille ont-ils fait hier l’admiration générale. N’étiez-vous pas là hier, monsieur de Morcerf ?

— Quel prince ? demanda Albert.

— Le prince Cavalcanti, reprit Danglars, qui s’obstinait toujours à donner ce titre au jeune homme.

— Ah ! pardon, dit Albert, j’ignorais qu’il fût prince. Ah ! le prince Cavalcanti a chanté hier avec mademoiselle Eugénie ? En vérité, ce devait être ravissant, et je regrette bien vivement de ne pas avoir entendu cela. Mais je n’ai pu me rendre à votre invitation, j’étais forcé d’accompagner madame de Morcerf chez la baronne de