Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

chambre, ah ! mon Dieu ! bien simple en apparence, une chambre comme toutes les chambres, tendue de damas rouge, qui m’a paru, je ne sais pourquoi, dramatique au possible.

— Pourquoi cela ? demanda Debray, pourquoi dramatique ?

— Est-ce que l’on se rend compte des choses instinctives ? dit Monte-Cristo ; est-ce qu’il n’y a pas des endroits où il semble qu’on respire naturellement la tristesse ? pourquoi ? on n’en sait rien ; par un enchaînement de souvenirs, par un caprice de la pensée qui nous reporte à d’autres temps, à d’autres lieux, qui n’ont peut-être aucun rapport avec les temps et les lieux où nous nous trouvons ; tant il y a que cette chambre me rappelait admirablement la chambre de la marquise de Ganges ou celle de Desdemona. Eh ! ma foi, tenez, puisque nous avons fini de dîner, il faut que je vous la montre, puis nous redescendrons prendre le café au jardin ; après le dîner, le spectacle.

Monte-Cristo fit un signe pour interroger ses convives, madame de Villefort se leva, Monte-Cristo en fit autant, tout le monde imita leur exemple.

Villefort et madame Danglars demeurèrent un instant comme cloués à leur place ; ils s’interrogeaient des yeux, froids, muets et glacés.

— Avez-vous entendu ? dit madame Danglars.

— Il faut y aller, répondit Villefort en se levant et en lui offrant le bras.

Tout le monde était déjà épars dans la maison, poussé par la curiosité, car on pensait bien que la visite ne se bornerait pas à cette chambre, et qu’en même temps on parcourrait le reste de cette masure dont Monte-Cristo avait fait un palais. Chacun s’élança donc par les portes