Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/180

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vicomte, et dites-lui que demain, avant dix heures, j’aurai vu la couleur du sien.

— Il ne me reste donc, dit Beauchamp qu’à fixer les arrangements du combat.

— Cela m’est parfaitement indifférent, monsieur, dit le comte de Monte-Cristo ; il était donc inutile de venir me déranger au spectacle pour si peu de chose. En France, on se bat à l’épée ou au pistolet : aux colonies, on prend la carabine : en Arabie, on a le poignard. Dites à votre client que, quoique insulté, pour être excentrique jusqu’au bout, je lui laisse le choix des armes, et que j’accepterai tout sans discussion, sans conteste ; tout, entendez-vous bien ? tout, même le combat par voie du sort, ce qui est toujours stupide. Mais moi, c’est autre chose : je suis sûr de gagner.

— Sûr de gagner ! répéta Beauchamp en regardant le comte d’un œil effaré.

— Eh certainement, dit Monte-Cristo en haussant légèrement les épaules. Sans cela je ne me battrais pas avec M. de Morcerf. Je le tuerai, il le faut, cela sera. Seulement, par un mot ce soir chez moi, indiquez-moi l’arme et l’heure ; je n’aime pas à me faire attendre.

— Au pistolet, à huit heures du matin, au bois de Vincennes, dit Beauchamp décontenancé, ne sachant pas s’il avait affaire à un fanfaron outrecuidant ou à un être surnaturel.

— C’est bien, monsieur, dit Monte-Cristo. Maintenant que tout est réglé, laissez-moi entendre le spectacle, je vous prie, et dites à votre ami Albert de ne pas revenir ce soir : il se ferait tort avec toutes ses brutalités de mauvais goût. Qu’il rentre et qu’il dorme.

Beauchamp sortit tout étonné.

— Maintenant, dit Monte-Cristo en se retournant vers Morrel, je compte sur vous, n’est-ce pas ?