Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/243

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— Un médecin ! un médecin ! … M. d’Avrigny ! cria Villefort, ou plutôt j’y vais moi-même.

Et il s’élança hors de l’appartement.

Par l’autre porte s’élançait Morrel.

Il venait d’être frappé au cœur par un épouvantable souvenir : cette conversation entre Villefort et le docteur, qu’il avait entendue la nuit où mourut madame de Saint-Méran, lui revenait à la mémoire ; ces symptômes, portés à un degré moins effrayant, étaient les mêmes qui avaient précédé la mort de Barrois.

En même temps il lui avait semblé entendre bruire à son oreille cette voix de Monte-Cristo, qui lui avait dit, il y avait deux heures à peine :

— De quelque chose que vous ayez besoin, Morrel, venez à moi, je peux beaucoup.

Plus rapide que la pensée, il s’élança donc du faubourg Saint-Honoré dans la rue Matignon, et de la rue Matignon dans l’avenue des Champs-Élysées.

Pendant ce temps, M. de Villefort arrivait, dans un cabriolet de place, à la porte de M. d’Avrigny ; il sonna avec tant de violence, que le concierge vint ouvrir d’un air effrayé. Villefort s’élança dans l’escalier sans avoir la force de rien dire. Le concierge le connaissait et le laissa passer en criant seulement :

— Dans son cabinet, M. le procureur du roi, dans son cabinet !

Villefort en poussait déjà ou plutôt en enfonçait la porte.

— Ah ! dit le docteur, c’est vous !

— Oui, dit Villefort en refermant la porte derrière lui ; oui, docteur, c’est moi qui viens vous demander à mon tour si nous sommes bien seuls. Docteur, ma maison est une maison maudite !