Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/75

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Monsieur de Villefort, envoyez chercher le prêtre, moi je serai le vengeur.

— Que voulez-vous dire, monsieur ? murmura Villefort, tremblant à cette nouvelle inspiration du délire de Morrel.

— Je veux dire, continua Morrel, qu’il y a deux hommes en vous, monsieur. Le père a assez pleuré ; que le procureur du roi commence son office.

Les yeux de Noirtier étincelèrent, d’Avrigny se rapprocha.

— Monsieur, continua le jeune homme, en recueillant des yeux tous les sentiments qui se révélaient sur les visages des assistants, je sais ce que je dis, et vous savez tous aussi bien que moi ce que je vais dire.

Valentine est morte assassinée !

Villefort baissa la tête ; d’Avrigny avança d’un pas encore ; Noirtier fit oui des yeux.

— Or, monsieur, continua Morrel, au temps où nous vivons, une créature, ne fût-elle pas jeune, ne fût-elle pas belle, ne fût-elle pas adorable comme était Valentine, une créature ne disparaît pas violemment du monde sans que l’on demande compte de sa disparition.

Allons ! monsieur le procureur du roi, ajouta Morrel avec une véhémence croissante, pas de pitié ! je vous dénonce le crime, cherchez l’assassin !

Et son œil implacable interrogeait Villefort, qui de son côté sollicitait du regard tantôt Noirtier, tantôt d’Avrigny.

Mais au lieu de trouver secours dans son père et dans le docteur, Villefort ne rencontra en eux qu’un regard aussi inflexible que celui de Morrel.

— Oui ! fit le vieillard.

— Certes ! dit d’Avrigny.