Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/147

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Et, du doigt, il indiquait le rocher perpendiculaire.

– Vous ne pouvez passer la nuit là, exposé à toutes les intempéries de la saison, nous ne le souffrirons pas.

– Comme on fait son lit, on se couche, répondit le mendiant en haussant les épaules ; et j’aime tant le grand air, que je me trouverai mieux à la place que j’ai choisie ; l’humilité est une de mes vertus, et, ne valant pas mieux qu’eux, je me contente du gîte que le bon Dieu donne aux oiseaux de la côte. Allons, ajouta-t-il en prenant l’accent traînant et nasillard des mendiants de profession, un peu de charité, mon bon monsieur, s’il vous plaît, et je prierai Dieu pour qu’il bénisse votre mariage et qu’il vous donne le paradis.

L’expression de railleuse impiété avec laquelle le blessé avait prononcé ces paroles, augmenta encore la répulsion que Marius ressentait pour lui ; cependant, il le chargea sur ses épaules, tourna le rocher, gravit le seul côté par lequel ce dernier fût praticable et déposa l’homme sur une plate-forme qui couronnait l’éminence.

Ce lieu était parfaitement choisi pour le campement d’un personnage qui paraissait peu avide de nouer quelques relations avec les douaniers et les pêcheurs qui hantaient le cap Croisette.