Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/181

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pût être pour quelque chose dans ses rêveries ; le jardin était désert ; le fusain, les lauriers du bosquet où tant de doux propos s’étaient échangés, avaient pris, il le lui sembla, des attitudes mornes et désolées ; il n’était pas jusqu’au chalet lui-même, avec ses volets rigoureusement fermés, qui ne lui parût avoir acquis depuis la veille une physionomie funèbre.

Le cœur de Marius se serra ; il vit ses pressentiments justifiés. C’était là l’image de la désolation dont le cœur de celle qu’il aimait était le théâtre, et cette désolation, c’était cette maudite absence qui l’avait causée. Il appela de tous ses désirs les ombres bienveillantes qui, en masquant son escalade, lui permettraient d’aller se justifier auprès de Madeleine ; les heures qui devaient s’écouler jusqu’au moment où elles envelopperaient les deux cabanons lui semblèrent devoir être d’une longueur désespérante.

M. Coumbes, en revanche, fut gai ; il assaisonna le dîner de mille plaisanteries qui faisaient ouvrir de grands yeux à Millette ; aux sourcils froncés de son filleul, à la persistance de son mutisme, au désespoir peint sur sa physionomie, le maître du cabanon avait jugé qu’il était suffisamment monté pour ne pas manquer de rendre sa visite au jardin de M. Riouffe ; il se frottait joyeusement les mains en songeant au coup de théâtre qu’il avait si habilement ménagé, à l’humiliation que les révélations qui en seraient la conséquence