Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/222

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bault qui tenait le milieu de la route, ne se rangea probablement pas assez vite, car le cavalier, voyant cette espèce de paysan qui lui faisait obstacle, lui allongea un terrible coup de cravache en lui criant :

– Range-toi donc, drôle ! si tu ne veux pas que je t’écrase !

Thibault sentit à la fois, au fond de son ivresse mal dissipée, le cinglement de la cravache, le choc du cheval et le froid de l’eau et de la boue dans lesquels il roulait.

Le cavalier passa.

Furieux, Thibault se releva sur un genou, et, montrant le poing à cette ombre qui fuyait :

– Mais, au nom du diable ! dit-il, ne serai-je donc pas, une fois seulement, grand seigneur à mon tour, pendant vingt-quatre heures, comme vous, monsieur Raoul de Vauparfond, au lieu d’être Thibault le sabotier comme je suis, afin d’avoir un bon cheval au lieu d’aller à pied, de fouailler les manants que je rencontrerai sur mon chemin ; et de courtiser les belles dames qui trompent leurs maris, comme fait la comtesse de Mont-Gobert !

À peine Thibault avait-il exprimé ce souhait, que le cheval du baron Raoul butta et envoya son cavalier rouler à dix pas devant lui.


XVI

une soubrette de grande dame


En voyant l’accident qui venait d’arriver au jeune seigneur dont la main un peu légère l’avait, quelques