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III

agnelette


Le seigneur Jean prit l’arme des mains d’Engoulevent, considéra longtemps l’épieu depuis la pointe jusqu’au manche, et cela sans mot dire.

Puis il montra au sabotier l’image d’un petit sabot sculptée sur la poignée, laquelle image servait à Thibault pour reconnaître sa propriété.

Ce sabot, c’était son chiffre comme compagnon du tour de France.

– Ah ! ah ! monsieur le drôle ! fit le grand louvetier, voici qui témoigne terriblement contre vous ! Savez-vous que cet épieu-là sent la venaison en diable, hum ! Or, voici ce qui me reste à vous dire, mon maître : vous avez braconné, ce qui est un gros crime ; vous vous êtes parjuré, ce qui est un gros péché ; nous allons, pour le salut de votre âme, par lequel vous avez juré, vous faire expier tout cela.

Alors, se retournant vers le premier piqueur :

– Marcotte, lui dit-il, prends-moi deux couples et lie-moi ce drôle-là à un arbre après lui avoir ôté veste et chemise ; puis tu lui appliqueras sur l’échine trente-six coups de ton baudrier, une douzaine pour le parjure, deux douzaines pour le braconnage ; non ! je me trompe : une douzaine, au contraire, pour le braconnage et deux douzaines pour le parjure ; il faut faire large la part du Bon Dieu.

Cet ordre était une bonne fortune pour la valetaille, qui se trouvait bien joyeuse d’avoir un patient sur le-