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LES FRÈRES CORSES

lui et en le serrant dans mes bras ; c’est vous, c’est donc vous !

Et, malgré moi, quelques larmes s’échappèrent de mes yeux.

— Oui, me dit-il, c’est moi.

Je calculai le temps écoulé : à peine si la lettre devait être arrivée, je ne dirai pas à Sullacaro, mais à Ajaccio.

— Oh ! mon Dieu ! m’écriai-je ; mais alors vous ne savez rien !

— Je sais tout, dit-il.

— Comment, tout ?

— Oui.

— Victor, dis-je en me retournant vers mon valet de chambre, assez mal rassuré encore, laissez-nous, ou plutôt revenez dans un quart d’heure, avec un plateau tout servi ; vous souperez avec moi, Lucien, et vous coucherez ici, n’est-ce pas ?

— J’accepte tout cela, dit-il ; je n’ai pas mangé depuis Auxerre. Puis, comme personne ne me connaissait, ou plutôt, ajouta-t-il avec un sourire profondément triste, comme tout le monde semblait me reconnaître chez mon pauvre frère, on n’a pas voulu m’ouvrir, et je m’en suis allé laissant toute la maison en révolution.

— En effet, mon cher Lucien, votre ressemblance avec Louis est si grande, que, moi-même, tout à l’heure j’en ai été frappé.