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LES FRÈRES CORSES

leur oncle, furent élevés comme de vrais Corses, et continuèrent de faire la guerre aux fils de Giudice. Cette guerre dura quatre siècles, et a fini seulement, comme vous avez pu le voir sur les carabines de mon père et de ma mère, le 21 septembre 1819, à onze heures du matin.

— En effet, je me rappelle cette inscription, dont je n’ai pas eu le temps de vous demander l’explication ; car, au moment même où je venais de la lire, nous descendîmes pour dîner.

— La voici : De la famille des Giudice, il ne restait plus, en 1819, que deux frères ; de la famille des Franchi, il ne restait plus que mon père, qui avait épousé sa cousine. Trois mois après ce mariage, les Giudice résolurent d’en finir d’un seul coup avec nous. L’un des frères s’embusqua sur la route d’Olmedo pour attendre mon père, qui revenait de Sartène, tandis que l’autre, profitant de cette absence, devait donner l’assaut à notre maison. La chose fut exécutée selon ce plan, mais tourna tout autrement que ne s’y attendaient les agresseurs. Mon père, prévenu, se tint sur ses gardes ; ma mère, avertie, rassembla nos bergers, de sorte qu’au moment de cette double attaque chacun était en défense : mon père sur la montagne, ma mère dans ma chambre même. Or, au bout de cinq minutes de combat, les deux frères Giudice tombaient, l’un frappé par mon père, l’autre frappé par ma mère. En voyant choir