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LES FRÈRES CORSES

de mars, on porte déjà depuis longtemps des pantalons blancs en Corse.

Il vit que je le regardais avec une certaine surprise.

— Vous admirez ma tenue, me dit-il ; c’est une nouvelle preuve que je me civilise.

— Oui, ma foi, répondis-je, et je vous avoue que je ne suis pas médiocrement étonné de trouver un tailleur de cette force à Ajaccio. Mais, moi, avec mon costume de velours, je vais avoir l’air de Jean de Paris auprès de vous.

— Aussi, ma toilette est-elle de l’Humann tout pur ; rien que cela, mon cher hôte. Comme nous sommes, mon frère et moi, absolument de la même taille, mon frère m’a fait cette plaisanterie de m’envoyer une garde-robe complète, que je n’endosse, comme vous le pensez bien, que dans les grandes occasions : quand M. le préfet passe ; quand M. le général commandant le quatre-vingt-sixième département fait sa tournée ; ou bien encore quand je reçois un hôte comme vous, et que ce bonheur se combine avec un événement aussi solennel que celui qui va s’accomplir.

Il y avait dans ce jeune homme une ironie éternelle conduite par un esprit supérieur, qui, tout en mettant son interlocuteur mal à l’aise avec lui, ne dépassait cependant jamais les bornes d’une parfaite convenance.

Je me contentai donc de m’incliner en signe de re-