Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/283

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séquence au mur et prit position, les bras croisés, le long de la tapisserie.

Nicolas Poulain suivit le duc, qui passa dans son cabinet. Il vit la porte s’ouvrir et se refermer, puis la portière retomber sur la porte, et il commença sérieusement à trembler.

— Voyons votre conspiration, Monsieur, dit sèchement le duc ; mais, pour Dieu ! qu’elle soit bonne : car j’avais aujourd’hui une multitude de choses agréables à faire, et si je perds mon temps à vous écouter, gare à vous !

— Eh ! monsieur le duc, dit Nicolas Poulain, il s’agit tout simplement du plus épouvantable des forfaits.

— Alors, voyons le forfait.

— Monsieur le duc…

— On veut me tuer, n’est-ce pas ? interrompit d’Épernon en se roidissant comme un Spartiate ; eh bien, soit ! ma vie est à Dieu et au roi, qu’on la prenne.

— Il ne s’agit pas de vous, Monseigneur.

— Ah ! cela m’étonne.

— Il s’agit du roi. On veut l’enlever, monsieur le duc.

— Oh ! encore cette vieille affaire d’enlèvement ! dit dédaigneusement d’Épernon.

— Cette fois la chose est assez sérieuse, monsieur le duc, si j’en crois les apparences.

— Et quel jour veut-on enlever Sa Majesté ?

— Monseigneur, la première fois que Sa Majesté ira à Vincennes dans sa litière.

— Comment l’enlèvera-t-on ?

— En tuant ses deux piqueurs.

— Et qui fera le coup ?

— Madame de Montpensier.

D’Épernon se mit à rire.

— Cette pauvre duchesse, dit-il, que de choses on lui attribue !

— Moins qu’elle n’en projette, Monseigneur.