Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/90

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Le soldat se mit à rire.

— Le capitaine qui commandait la revue ne serait pas entré à l’Épée du fier Chevalier, madame Fournichon, dit-il.

— Et pourquoi cela ? demanda l’hôtesse ; il est donc trop grand seigneur pour cela ?

— Peut-être.

— Eh bien, si je vous disais que ce n’est pas pour lui qu’il est entré à l’hôtellerie du Fier Chevalier ?

— Et pour qui donc ?

— Pour ses amis.

— Le capitaine qui commandait la revue ne logerait pas ses amis à l’Épée du fier Chevalier, j’en réponds.

— Peste ! comme vous y allez, mon brave homme ! Et quel est donc ce monsieur qui est trop grand seigneur pour loger ses amis au meilleur hôtel de Paris ?

— Vous voulez parler de celui qui commandait la revue, n’est-ce pas ?

— Sans doute.

— Eh bien ! ma bonne femme, celui qui commandait la revue est purement et simplement M. le duc Nogaret de La Valette d’Épernon, pair de France, colonel général de l’infanterie du roi, et un peu plus roi que Sa Majesté elle-même. Eh bien ! qu’en dites-vous, de celui-là ?

— Que si c’est lui qui est venu, il m’a fait honneur.

— L’avez-vous entendu dire parfandious ?

— Eh ! eh ! fit la dame Fournichon, qui avait vu bien des choses extraordinaires dans sa vie, et à qui le mot parfandious n’était pas tout à fait inconnu.

Maintenant on peut juger si le 26 octobre était attendu avec impatience.

Le 25 au soir, un homme entra, portant un sac assez lourd, qu’il déposa sur le buffet de Fournichon.

— C’est le prix du repas commandé pour demain, dit-il.

— À combien par tête ? demandèrent ensemble les deux époux.