trouvait Alexandre Farnèse dans le Luxembourg. Pourquoi, en cas d’urgence, n’accepterait-elle pas les secours de l’Espagne contre Anjou, comme elle avait accepté le secours d’Anjou contre l’Espagne ?
Quitte, après cela, à repousser l’Espagne après que l’Espagne l’aurait aidée à repousser Anjou.
Ces républicains monotones avaient pour eux la force d’airain du bon sens.
Tout à coup ils virent apparaître une flotte à l’embouchure de l’Escaut, et ils apprirent que cette flotte arrivait avec le grand amiral de France, et que ce grand amiral de France amenait un secours à leur ennemi.
Depuis qu’il était venu mettre le siège devant Anvers, le duc d’Anjou était devenu naturellement l’ennemi des Anversois.
En apercevant cette flotte, et en apprenant l’arrivée de Joyeuse, les calvinistes du duc d’Anjou firent une grimace presque égale à celle que faisaient les Flamands. Les calvinistes étaient fort braves, mais en même temps fort jaloux ; ils passaient facilement sur les questions d’argent, mais n’aimaient point qu’on vînt rogner leurs lauriers, surtout avec des épées qui avaient servi à saigner tant de huguenots au jour de la Saint-Barthélemy.
De là, force querelles qui commencèrent le soir même de l’arrivée de Joyeuse, et se continuèrent triomphalement le lendemain et le surlendemain.
Du haut de leurs remparts, les Anversois avaient chaque jour le spectacle de dix ou douze duels entre catholiques et huguenots. Les polders servaient de champ clos, et l’on jetait dans le fleuve beaucoup plus de morts qu’une affaire en rase campagne n’en eût coûté aux Français. Si le siège d’Anvers, comme celui de Troie, eût duré neuf ans, les assiégés n’eussent eu besoin de rien faire autre chose que de regarder faire les assiégeants ; ceux-ci se fussent certainement détruits eux-mêmes.