Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 3.djvu/203

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— Il paraît, puisque je l’ai achetée.

— Mais l’ancien propriétaire ?

— Ne l’habite plus, comme vous voyez.

— Où est-il ?

— Je n’en sais rien.

— Voyons, entendons-nous bien, dit Chicot.

— Je ne demande pas mieux, répondit Ernauton avec une impatience visible ; seulement, entendons-nous vite.

— L’ancien propriétaire était un homme de vingt-cinq à trente ans, qui en paraissait quarante ?

— Non ; c’était un homme de soixante-cinq à soixante-six ans, qui paraissait son âge.

— Chauve ?

— Non, au contraire, avec une forêt de cheveux blancs.

— Il a une cicatrice énorme au côté gauche de la tête, n’est-ce pas ?

— Je n’ai pas vu la cicatrice, mais bon nombre de rides.

— Je n’y comprends plus rien, fit Chicot.

— Enfin, reprit Ernauton après un instant de silence, que vouliez-vous à cet homme, mon cher monsieur l’Ombre ?

Chicot allait avouer ce qu’il venait faire ; tout à coup le mystère de la surprise d’Ernauton lui rappela certain proverbe cher aux gens discrets.

— Je voulais lui rendre une petite visite comme cela se fait entre voisins, dit-il, voilà tout.

De cette façon, Chicot ne mentait pas et ne disait rien.

— Mon cher Monsieur, dit Ernauton avec politesse, mais en diminuant considérablement l’ouverture de la porte qu’il tenait entre-bâillée, mon cher Monsieur, je regrette de ne pouvoir vous donner des renseignements plus précis.

— Merci, Monsieur, dit Chicot, je chercherai ailleurs.

— Mais, continua Ernauton en continuant de repousser la porte, cela ne m’empêche point de m’applaudir du hasard qui me remet en contact avec vous.