Le cavalier poussa son cheval sur eux ; il était armé, car on entendait son épée battre sur ses éperons.
Les porteurs voulurent s’opposer à son passage ; mais il leur adressa quelques mots à voix basse, et non-seulement ils s’écartèrent respectueusement, mais encore l’un d’eux, dès qu’il eut mis pied à terre, reçut de ses mains les brides de son cheval.
L’inconnu s’avança vers la porte et y heurta rudement.
— Tudieu ! se dit Chicot, que j’ai bien fait de rester ! Mes pressentiments, qui m’annonçaient qu’il allait se passer quelque chose, ne m’avaient point trompé. Voilà le mari, pauvre Ernauton ! nous allons assister tout à l’heure à quelque égorgement. Cependant, si c’est le mari, il est bien bon d’annoncer son retour en frappant si rudement.
Toutefois, malgré la façon magistrale dont avait frappé l’inconnu, on paraissait hésiter à ouvrir.
— Ouvrez ! cria celui qui heurtait.
— Ouvrez, ouvrez ! répétèrent les porteurs.
— Décidément, reprit Chicot, c’est le mari ; il a menacé les porteurs de les faire fouetter ou pendre, et les porteurs sont pour lui. Pauvre Ernauton ! il va être écorché vif. Oh ! oh ! si je le souffre, cependant, ajouta Chicot. Car enfin, reprit-il, il m’a secouru, et par conséquent, le cas échéant, je dois le secourir. Or, il me semble que le cas est échu ou n’échoira jamais.
Chicot était résolu et généreux ; curieux, en outre ; il détacha sa longue épée, la mit sous son bras, et descendit précipitamment son escalier.
Chicot savait ouvrir sa porte sans la faire crier, ce qui est une science indispensable à quiconque veut écouter avec profit.
Chicot se glissa sous le balcon, derrière un pilier et attendit.
À peine était-il installé que la porte s’ouvrit en face, sur un mot que l’inconnu souffla par la serrure ; cependant il demeura sur le seuil.