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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/20

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Amis ! s’empressa de répondre le commandant de la colonne.

— Êtes-vous républicains ?

— Oui, et nous venons à votre aide.

— Vive la République ! crièrent alors en chœur les défenseurs de la barricade.

Un des chefs, nommé Rossignol, ne put résister au bonheur de serrer avant les autres la main à des coreligionnaires ; il sauta par-dessus la barricade, et s’avança vers les gardes nationaux en criant :

— Soyez les bienvenus !

Mais à l’instant même un cri partit des rangs de la garde nationale :

— Ah ! brigands ! nous vous tenons enfin.

— Feu, mes amis ! cria Rossignol, ce sont des philippistes.

Et une décharge partit de l’intérieur de la barricade, et tua cinq hommes à la garde nationale.

C’était le pendant de : « À moi d’Auvergne ! c’est l’ennemi. » Seulement, plus heureux que le chevalier d’Assas, Rossignol, à travers une grêle de balles, rentra sain et sauf dans la barricade[1].

Après une lutte terrible, après être revenue trois fois à la charge la garde nationale fut repoussée.

Et vieillards qui avaient quitté leurs moules à balles, enfants qui avaient cessé de faire des bourres pour prendre les armes, déposèrent leurs fusils, et se remirent à la besogne.

Un enfant de douze ans avait été blessé à la tête par la première décharge ; Jeanne, ni comme chef, ni comme ami, ne put obtenir de lui qu’il quittât la barricade.

Les gardes nationaux s’éloignèrent, abandonnant leurs morts et leurs blessés ; mais, aussitôt le champ de bataille libre, Jeanne et ses hommes franchirent la barricade, et allèrent ramasser les blessés, qu’ils portèrent à leurs ambulances.

  1. Noël Parfait, Épisodes des 6 et 6 juin 1832.