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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/222

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

» Ce n’est pas la première fois, M. Odilon Barrot vous l’a dit avant moi, messieurs, que le tribunal de commerce aura été appelé à condamner, sans sortir de sa compétence, les actes arbitraires du pouvoir. Le premier tribunal qui a déclaré illégales les ordonnances du 25 juillet 1830, personne ne l’a oublié, c’est le tribunal de commerce. Vous suivrez, messieurs, ces mémorables antécédents, et, quoique la question soit bien moindre, vous maintiendrez le droit aujourd’hui, comme vous l’avez maintenu alors ; vous écoulerez, je l’espère, avec sympathie, ce que j’ai à vous dire ; vous avertirez par votre sentence le gouvernement qu’il entre dans une voie mauvaise, et qu’il a eu tort de brutaliser l’art et la pensée ; vous me rendrez mon droit et mon bien ; vous flétrirez au front la police et la censure, qui sont venues chez moi, de nuit, me voler ma liberté et ma propriété avec effraction de la Charte.

» Et ce que je dis ici, je le dis sans colère ; cette réparation que je vous demande, je la demande avec gravité et modération. À Dieu ne plaise que je gâte la beauté et la bonté de ma cause par des paroles violentes ! Qui a le droit a la force, et qui a la force dédaigne la violence.

» Oui, messieurs, le droites ! de mon côté. L’admirable discussion de M. Odilon Barrot vous a prouvé victorieusement qu’il n’y a rien dans l’acte ministériel qui a défendu le Roi s’amuse que d’arbitraire, d’illégal et d’inconstitutionnel. En vain essayerait-on de faire revivre, pour attribuer la censure au pouvoir, une loi de la Terreur, une loi qui ordonne en propres termes aux théâtres de jouer trois fois par semaine les tragédies de Brutus et de Guillaume Tell, de ne monter que des pièces républicaines, et d’arrêter les représentations de tout ouvrage qui tendrait, je cite textuellement, à dépraver l’esprit public et à réveiller la honteuse superstition de la royauté. Cette loi, messieurs, les appuis actuels de la royauté nouvelle oseraient-ils bien l’invoquer, et l’invoquer contre le Roi s’amuse ? N’est-elle pas évidemment abrogée dans son texte comme dans son esprit ? Faite pour la Terreur, elle est morte avec la Terreur. N’en est-il pas de même de tous ces décrets impériaux d’après lesquels, par exemple, le pouvoir aurait