Ménilmontant, le cuirassier, le sabre à la main, s’élança sur le corps de garde ; le peuple le suivit. En un instant, le poste fut pris, et les soldats furent désarmés.
On continuait de suivre les boulevards aux cris de « Vive la République ! » cris qui, presque partout, étaient accueillis par les bravos.
À la hauteur de la rue de Lancry, on rencontra Carrel à cheval. Il venait, comme un général, s’assurer de l’état des choses.
— Avez-vous un régiment avec vous ? demanda-t-il.
— Nous les avons tous ! lui cria-t-on.
— C’est trop ; je n’en veux qu’un seul, dit-il en riant.
Et il reprit au gaiop le chemin de la Bastille.
Les artilleurs prirent la rue Bourbon-Villeneuve. À leur vue, le poste de la Banque courut aux fusils, mais, au grand étonnement des insurgés, leur présenta les armes.
On ne pouvait, cependant, traverser ainsi tout Paris ; on était à quelques pas du Vaudeville, on y déposa le drapeau ; on mangea rapidement un morceau, et l’on courut au National, rue du Croissant.
Les républicains y affluaient, et, au milieu des républicains, des hommes d’une Opinion intermédiaire, comme Hippolyte Royer-Collard, par exemple.
Carrel arriva sur ces entrefaites ; on attendait son opinion avec impatience.
— Je n’ai pas grande confiance dans la barricade, dit-il ; nous avons réussi on 1830, c’est un accident. Que ceux qui sont d’un autre avis que moi remuent les pavés, je ne les y engage pas, je ne les désapprouve pas ; seulement, en sauvant le National, et en l’empêchant de se compromettre comme joutnal, je leur garde un bouclier pour le lendemain. Croyez qu’il y a plus de courage à dire à mes amis ce que je leur dis, qu’à essayer avec eux ce qu’ils vont entreprendre.
Comme Carrel prononçait oes quelques mois, Thomas arrivait dù boulevard Bourdon.
— Nous n’avons rien à faire ici, dit Thomas ; allons-nous-en !