vaise, me jeta tout fatigué dans la ville des palais ; je trouvai à table d’hôte un de mes amis qui arrivait de Naples, plus fatigué encore que moi : il m’offrit de revenir ensemble en poste, mais à la condition que nous passerions par le Simplon, qu’il n’avait pas vu. J’acceptai ; nous louâmes une espèce de carriole, et nous partîmes.
Le Simplon traversé, le Valais franchi, nous nous arrêtâmes à la porte de l’auberge de la Poste, à Martigny.
Le maître d’auberge, le chapeau à la main, vint poliment nous inviter à prendre, en passant, un repas chez lui. Nous avions dîné à Sion : nous le remerciâmes.
Il se retira aussi poliment qu’il était venu.
— Voilà un aubergiste bien charmant ! me dit mon ami.
— Tu trouves ?
— Ma foi, oui.
— Et quand je pense que, si je lui disais mon nom, je serais, probablement, obligé de lui donner une volée pendant que nous relayons.
— Pourquoi cela ?
— Parce que, au lieu de faire fortune avec une plaisanterie que j’ai risquée sur lui, il a eu la niaiserie de s’en fâcher, et m’en veut mal de mort.
— À toi ?
— Eh ! mon Dieu, oui !
— Ah bah !
— Rappelle-le un peu, et dis-lui que nous nous arrêterons si, par hasard, il peut nous donner un bifteck d’ours.
— Hé ! monsieur !… Monsieur le maître de l’hôtel ! cria mon ami avant que j’eusse eu le temps de l’en empêcher.
Le maître de l’hôtel se retourna.
— Voici mon compagnon qui dit qu’il s’arrêtera pour dîner chez vous, si vous avez, par hasard, du bifteck d’ours.
J’ai vu bien des figures se décomposer dans ma vie ; j’ai vu ccs décompositions arriver à la suite de nouvelles terribles, d’accidents inattendus, de blessures graves… Je n’ai jamais vu décomposition de physionomie pareille à celle du malheureux maître de poste de Jlarligny.