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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/192

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Elle s’appelle l’allée des Soupirs : je viens de là.

J’avais répondu dans toute la naïveté de mon âme ; je n’avais l’intention de faire ni esprit ni sentiment.

Ces deux défauts-là me sont venus plus tard.

— Quand je te disais qu’il était charmant ! dit Vittoria à Laure.

Je ne comprenais ni pourquoi ni comment j’étais charmant. Aussi, au lieu de remercier l’Espagnole du compliment qu’elle m’adressait, lui fis-je une moue qui me fut payée par les éclats de rire des deux jeunes filles.

Je fus prêt à retourner dans mon allée des Soupirs ; mais je n’en eus pas le courage ; j’étais déjà comme ces amoureux de Molière, qui remontent toujours vers la porte, mais qui ne peuvent jamais se décider à la franchir.

On se remettait en place pour la contredanse.

— Voyons, dit Laure, ne boudez pas, monsieur l’écolier, je vous invite à danser cette fois… Acceptez-vous ?

— Hélas ! oui, répondis-je.

— Comment, hélas ?…

— Oui, je m’entends.

Et je lui donnai la main.

Le reste de la soirée et une partie de la nuit s’écoulèrent à danser et à valser. Nous rentrâmes à une heure du matin.

Niguet, mon maître clerc, reconduisait mademoiselle Vittoria ; je reconduisis mademoiselle Laurence.

Le reste de la nuit se composa des heures les plus agitées que j’eusse eues de ma vie.


L


Un chapitre inédit du Diable boiteux. — Histoire de Samud et de la belle doña Lorenza.

Quinze jours environ après cette fameuse soirée, pendant laquelle j’avais passé par tant d’émotions nouvelles et in-