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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS


LII


Adolphe de Leuven. — Sa famille. — Détails inconnus sur la mort de Gustave III. — Le comte de Ribbing. — Les cordonniers au château de Villers-Hellon.

C’était à la fête d’un charmant village situé à une lieue de Villers-Cotterets, et nommé Corcy, perdu au milieu des grands bois, comme un nid l’est dans les hautes branches. J’avais, pour un instant, laissé mes compagnons dans le rond de danse, et je m’étais éloigné pour faire une visite à un fermier, vieil ami de mon père, dont la ferme était distante du village d’un quart de lieue, à peu près.

La route que je suivais pour me rendre chez lui était un joli sentier tracé au pied d’une colline, bordé, à droite et à gauche, d’une double haie d’épines blanches, et tout parsemé de ces petites pâquerettes à cœur d’or et à feuilles teintées de rose à leur extrémité.

Tout à coup, au coude du chemin, dans un rayon de soleil qui les baignait de lumière, je vis apparaître, venant à moi, trois personnes, dont deux m’étaient bien connues, mais dont la troisième m’était totalement étrangère.

Les deux personnes qui m’étaient connues étaient, l’une, Caroline Collard, devenue, comme je l’ai dit plus haut, baronne Capelle.

L’autre était sa fille, Marie Capelle, âgée de trois ans alors, et qui depuis, pour son malheur, fut madame Lafarge.

La troisième personne, celle qui m’était étrangère, et qui ressemblait, au premier aspect, à un étudiant allemand, était un jeune homme de seize à dix-sept ans, vêtu d’une veste grise, d’une casquette de toile cirée, d’un gilet chamois et d’un pantalon bleu clair, presque aussi collant que le mien, et qui n’offrait avec lui que cette différence, que, chez moi, c’étaient les bottes qui recouvraient le pantalon, tandis que