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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/202

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Puis, s’adressant à moi :

— Vous connaissez déjà Lassagne ? me dit-il.

— Oui, je viens de causer cinq minutes avec lui.

— C’est un charmant garçon qui n’aura qu’un défaut : celui d’être trop faible pour vous ; heureusement, je serai là. Lassagne et Ernest Basset vous diront ce que vous aurez à faire.

— Et M. de Broval ? lui demandai-je.

M. de Broval était le directeur général.

— M. de Broval va savoir que vous êtes arrivé, et vous fera probablement demander. Vous savez que tout votre avenir dépend de lui ?

— Et de vous, oui, monsieur.

— J’espère que, de mon côté, cela ne vous inquiète pas beaucoup… Mais allez remercier M. Deviolaine ; allez ! vous avez déjà trop tardé.

Je saluai M. Oudard, et je sortis.

Cinq minutes après, j’entrais chez M. Deviolaine.

Il travaillait dans un grand cabinet, seul, et à un bureau isolé au milieu de la chambre.

Comme j’étais précédé d’un garçon de bureau, et que l’on présuma que j’étais envoyé par M. Oudard, on me laissa entrer sans m’annoncer.

M. Deviolaine entendit ouvrir la porte : il attendit un instant que l’on parlât ; puis, comme j’attendais, de mon côté, qu’il levât le nez :

— Qui est là ? demanda-t-il.

— C’est moi, monsieur Deviolaine.

— Qui, toi ?

— Vous voyez bien que vous m’avez reconnu, puisque vous me tutoyez.

— Oui, je t’ai reconnu… C’est donc toi ? Eh bien, tu fais un joli garçon !

— Pourquoi, s’il vous plaît ?

— Comment ! tu viens trois fois à Paris, sans me rendre une seule visite.

— J’ignorais si je vous ferais plaisir.