— Pourquoi cela ?
— Parce que ce n’est ni un ancien Grec, ni un vieux Romain.
— Qu’est-ce que c’est donc, que Corneille ?
— C’est un Cordouan, comme Lucain ; vous verrez, quand vous comparerez, que son vers a de grandes ressemblances avec celui de la Pharsale.
— Voudriez-vous me laisser écrire tout ce que vous me dites là ?
— Pourquoi faire ?
— Pour en faire la règle de mes études.
— C’est inutile, puisque vous m’avez là.
— Mais peut-être ne vous aurai-je pas toujours.
— Si vous ne m’avez pas, vous en aurez un autre.
— Cet autre ne sera peut-être pas aussi savant que vous ?
Lassagne haussa les épaules.
— Mon cher enfant, me dit-il, je ne sais que ce que tout le monde sait ; je ne vous dis que ce que le premier venu vous dira.
— Alors, je suis bien ignorant ! murmurai-je en laissant tomber ma tête dans mes mains.
— Le fait est que vous avez beaucoup à apprendre ; mais vous êtes jeune, vous apprendrez.
— Et en roman, dites-moi, qu’y a-t-il à faire ?
— Tout, comme au théâtre.
— Je croyais cependant que nous avions d’excellents romans.
— Qu’avez-vous lu en romans ?
— Ceux de Lesage, de madame Cottin et de Pigault-Lebrun.
— Quel effet vous ont-ils produit ?
— Les romans de Lesage m’ont amusé ; ceux de madame Cottin m’ont fait pleurer ; ceux de Pigault-Lebrun m’ont fait rire.
— Alors, vous n’avez lu ni Gœthe, ni Walter Scott, ni Cooper ?
— Je n’ai lu ni Gœthe, ni Walter Scott, ni Cooper.
— Eh bien, lisez-les.
— Et, quand je les aurai lus, que ferai-je ?