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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/226

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

moyen de le faire plier. Savez-vous ce, qu’il a dit à Warez ?

— Qu’est-ce que c’est que Warez ?

— Warez, c’est le régisseur de madame Oudinot, directrice de l’Ambigu.

— Eh bien, qu’a-t-il dit à Warez ?

— Nous lui avions porté à lire un mélodrame, intitulé le Château de Kenilworth ; Warez le lit, Il n’avait pas d’opinion bien arrêtée sur l’ouvrage. Quand nous allons, hier, pour avoir la réponse : « Messieurs, nous dit-il, autorisez-moi à faire lire votre pièce par M. Picard, — Oui, répond Soulié, pour qu’il nous la vole. — Oh ! monsieur Soulié, s’écrie Warez, vous voler votre pièce ! un académicien ! — Tiens ! dit Soulié, les trois quarts des académiciens volent bien leur fauteuil, pourquoi ne voleraient-ils pas des pièces ? » Vous comprenez, mon cher ami, encore une porte fermée ! J’avais bien eu l’idée d’aller chez mademoiselle Lévesque, qui est toute-puissante au théâtre, et de lui offrir le rôle de Marie Stuart, qui est magnifique…

— Eh bien ?

— Vous savez ce qui est arrivé à Casimir Delavigne, lors de la lecture des Vêpres siciliennes, au Théâtre-Français.

— Oui, la pièce a été refusée.

— Non-seulement la pièce a été refusée, mais encore, comme chaque votant est obligé de motiver son refus, une de ces dames a refusé « parce que l’ouvrage était mal écrite. »

— Et mademoiselle Lévesque vous a refusé pour le même motif ?

— Non ; mais elle nous a dit que, dans ce moment ici, elle avait tant de créations, qu’elle ne pouvait pas se charger de la nôtre.

— Diable ! il paraît qu’il est inutile de faire, pour être actrice, des études aussi fortes que pour être auteur… Ah ! mon cher ami, comment ne m’avez-vous pas dit que je ne savais rien, et que j’avais tout à apprendre ?

— Eh la ! mon cher, ne vous inquiétez donc pas de cela, vous apprendrez au fur et à mesure des besoins… Tenez, voici