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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 4.djvu/198

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

docteur, docteur ! continua-t-il en secouant la tête, j’ai bien sujet d’être malade !

Malgré les observations du docteur, Alexandre voulut faire à cheval une partie du chemin. Enfin, force lui fut de remonter dans sa voiture, et il arriva à Taganrog, si faible, qu’en remettant le pied dans la maison du gouverneur, il s’évanouit.

L’impératrice, mourante elle-même d’une maladie de cœur, oublia ce qu’elle souffrait, et reprit ses forces à cette vue.

En revenant à lui, Alexandre écrivit à l’impératrice mère.

Il lui disait qu’il était souffrant, mais qu’elle se tranquillisât ; qu’il se ménageait, et qu’il n’y avait rien de sérieux à craindre.

Cela se passait le 18 novembre.

Le 24, la fièvre redoubla, et l’érésipèle de la jambe disparut.

— Allons ! s’écria l’empereur en s’apercevant de cet accident ; c’est fini… Je mourrai comme ma sœur !

Cependant il refusa de prendre aucun médicament.

Le soir, comme le docteur Wylie était près de lui :

— Oh ! mon ami, s’écria-t-il tout à coup en se retournant de son côté, quelle action ! quelle épouvantable action !…

À quel souvenir se rattachait ce cri de douleur ? À un seul, sans doute, à la mort de Paul, étouffé au-dessus de sa tête, et dont il entendit les derniers gémissements, sans oser lui porter secours.

Le 27, enfin, l’empereur s’abandonna aux soins du docteur, qui lui appliqua des sangsues. Il résulta de cette application un peu de calme ; mais la fièvre revint bientôt plus ardente et plus acharnée.

Des sinapismes furent appliqués, mais ne purent prendre le dessus.

Le malade songea, alors, qu’il était temps de se préparer à mourir.

Á cinq heures du matin, le confesseur fut introduit près de lui.