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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/126

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Mars. Mademoiselle Mars lisait peu, ou plutôt ne lisait pas du tout. Elle chargea Merlin de classer les livres du défunt, et d’en faire la vente. Merlin, le plus honnête homme de la terre, s’occupa de cette mission avec sa conscience ordinaire, et il feuilleta et refeuilleta si bien chaque volume, qu’un jour, il entra dans la chambre de mademoiselle Mars tenant trente ou quarante billets de mille francs, qu’il déposa sur une table.

— Qu’est-ce que cela, Merlin ? demanda mademoiselle Mars.

— Je ne sais, madame, dit celui-ci.

— Comment, vous ne savez ? Mais ce sont des billets de banque !…

— Sans doute.

— Où donc les avez-vous trouvés ?

— Mais dans un portefeuille pratiqué sous la couverture d’une Bible très-rare. Comme la Bible était à vous, les billets de banque sont aussi à vous.

Mademoiselle Mars prit les billets de banque, qui, en effet, étaient bien à elle, et eut grand’peine à faire accepter à Merlin, en cadeau, la Bible dans laquelle les billets de banque avaient été trouvés.

Nodier rentrait chez lui de trois à quatre heures, et, comme M. Villenave, se laissait habiller et pomponner par sa fille Marie.

Car — nous avons oublié de le dire — la famille de Nodier se composait de sa femme, de sa fille, de sa sœur madame de Tercy, et de sa nièce.

À six heures, la table était mise chez Nodier. Trois ou quatre couverts en plus des couverts de la famille attendaient les dîneurs de fondation.

Trois ou quatre autres couverts attendaient les dîneurs de hasard.

Les dîneurs de fondation étaient de Cailleux, le directeur du Musée ; le baron Taylor, qui, partant pour l’Égypte, laissa bientôt sa place vacante ; Francis Wey, que Nodier aimait comme son enfant, et dont l’accent franc-comtois faisait second dessus de celui de Nodier, et Dauzats.