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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/22

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Ce fut donc sous ce titre que fut jouée, au Vaudeville, la parodie d’Henri III et sa Cour.

Cette parodie parodiait la pièce, scène par scène.

Or, à la fin du quatrième acte, la scène d’adieu de Saint-Mégrin à son domestique était parodiée par une scène entre le héros de la parodie — j’ai eu le malheur d’oublier son nom — et son portier.

Dans cette scène très-tendre, très-touchante, très-sentimentale, le héros demandait au portier une mèche de ses cheveux, sur l’air Dormez donc, mes chères amours ! fort en vogue a cette époque-là, et tout à fait approprié à la situation.

Le soir de la représentation, tout le monde sortit en chantant le refrain de l’air, et les paroles de la chanson.

Trois ou quatre jours après, nous dînâmes chez Véfour, de Leuven, Eugène Sue, Desforges, Desmares, Rousseau, quelques autres et moi.

À la fin du dîner, qui avait été fort gai, et où le fameux refrain :

Portier, je veux
De tes cheveux !

avait été chanté en chœur, Eugène Sue et Desmares résolurent de donner une réalité à ce rêve de notre imagination ; et, entrant dans la maison n°8 de la rue de la Chaussée-d’Antin, dont Eugène Sue connaissait le concierge de nom, ils demandèrent au brave homme s’il ne se nommait pas M. Pipelet.

Celui-ci répondit affirmativement.

Alors, au nom d’une princesse polonaise qui l’avait vu, et qui était devenue amoureuse de lui, ils lui demandèrent avec tant d’instances une boucle de ses cheveux, que, pour se débarrasser d’eux, le pauvre Pipelet finit par la leur donner.

Du moment qu’il eut commis cette faiblesse, Pipelet fut un homme perdu. Le même soir, trois autres demandes lui furent adressées de la part d’une princesse russe, d’une baronne allemande et d’une marquise italienne, et, à chaque fois