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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/60

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Ni plus ni moins… Risquez-vous le paquet ?

— Monsieur, je me lève, et je vais avec vous à la manutention.

— À la bonne heure !

Le préfet se leva et alla avec Charras à la manutention.

On chargeait le pain.

— Je vous laisse ici, monsieur, dit Charras ; vous avez tout intérêt à ce que les voitures partent promptement, vous le savez…

Et l’infatigable messager reprit la route de Cognières.

Pendant ce temps, les trois commissaires avaient gagné Rambouillet, où ils étaient arrivés vers les neuf heures du soir.

Tout y était dans la plus grande confusion. Un événement qui ne manquait pas d’un certain caractère de grandeur y avait jeté le trouble dans les esprits.

Le matin, ce même colonel Poque par lequel la Fayette avait fait dire à Étienne Arago d’ôter sa cocarde, y était arrivé avec une bande hâtive d’insurgés.

Peut-être avait-il quelque mission particulière pour le général Vincent, sous lequel il avait servi en 1814.

Tant il y a qu’arrivé en face des avant-postes, il avait laissé sa petite troupe derrière lui, et, le mouchoir à la main, s’était approché à la portée de la voix.

Il était accompagné d’un cuirassier qui avait passé avec le peuple, et qui suivait le colonel Poque comme ordonnance.

Le général Vincent était aux avant-postes royalistes. Il cria au colonel de s’arrêter.

Le colonel s’arrêta ; mais, faisant flotter son mouchoir, déclara qu’il ne se retirerait qu’après avoir parlé aux soldats.

Le général Vincent déclara, de son côté, que, si Poque ne se retirait pas, il allait faire tirer sur lui.

Poque se croisa les bras, et attendit. Le général le somma par trois fois de se retirer, et, voyant son immobilité, ordonna, à la troisième fois, de faire feu.

Tout le premier rang obéit.

Le cheval du cuirassier, frappé de trois balles, s’abattit sous lui.