châmes tout habillés sur les matelas. Les Spartiates en prirent un seul, les Sybarites en prirent deux.
Je me réveillai le premier ; à peine faisait-il jour.
Dans les quelques moments qui s’étaient écoulés entre l’extinction de la lumière et la venue du sommeil, j’avais songé à l’avenir, et je m’étais promis, dès que je serais éveillé, de chercher des yeux un village, un hameau quelconque où nous pussions nous approvisionner.
Je montai donc, comme lady Malbrouck, aussi haut que je pus monter, non pas à ma tour, mais au grenier.
On apercevait au loin un clocher perdu dans les arbres : c’était probablement celui du village de Montigny.
La distance à laquelle il était situé m’inspirait de fort tristes réflexions, lorsqu’en abaissant mélancoliquement mes yeux vers la terre, j’aperçus un poulet qui picorait dans une allée ; puis, dans une autre allée, un autre poulet ; puis, dans une espèce de mare, un canard barbotant.
Il était évident que c’était l’arrière-garde du poulailler, qui, par une fuite intelligente, s’était soustraite à la mort.
Je descendis, je pris mon fusil dans la cuisine, je mis deux cartouches de rechange dans ma poche, et je courus au jardin.
Trois coups de fusil firent raison des poulets et du canard. Nous avions de quoi déjeuner.
En outre, on dépêcherait deux de nous au village pour avoir des œufs, du pain, du vin et du beurre.
À mes trois coups de fusil, les fenêtres s’ouvrirent, et j’y vis apparaître des têtes qui avaient l’air d’autant de points d’interrogation.
Je montrai mes deux poulets d’une main, et mon canard de l’autre.
Il y avait progrès ; aussi ce double geste, tout simple qu’il était, arracha-t-il aux spectateurs des cris d’admiration.
La veille, à souper, nous n’avions que du rôti ; à déjeuner, nous allions avoir rôti et ragoût.
Je comptais mettre aux navets le canard, qui me paraissait d’un âge mûr.