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Page:Dumas - Une Année à Florence.djvu/219

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de Sicile. L’artiste, qui était de Pise, ainsi que l’indique son nom, reçut en outre les honneurs de la cittadinanza.

Restaient deux autres portes à exécuter ; le travail merveilleux du premier ouvrier rendait difficile le choix du second ; on résolut de les mettre au concours. Chaque concurrent adopté par la commission devait recevoir de la Magnifique république une somme suffisante pour vivre un an, et, au bout de cette année, présenter son esquisse. Brunelleschi, Donatello, Lorenzo de Bartoluccio, Jacopo della Quercia de Sienne, Nicolas d’Arezzo, son élève, François de Valdambrine et Simon de Colle, appelé Simon des Bronzes, à cause de son habileté à mouler cette matière, se présentèrent et furent reçus sans difficultés.

Il y avait alors à Rimini un jeune homme qui faisait son tour d’Italie, comme on fait chez nous son tour de France ; il allait de Venise à Rome, mais il avait été arrêté au passage par le seigneur Malatesta. C’était un de ces tyrans artistes du moyen âge qui prenaient tant à cœur l’intérêt de l’art : aussi, comme je l’ai dit, avait-il arrêté ce jeune homme, et lui faisait-il faire force belles fresques. Dans les intervalles de son travail, le jeune homme, qui était en outre orfèvre et sculpteur, s’amusait, pour se distraire, à mouler des petites figures en glaise et en cire, que le seigneur Malatesta donnait à ses beaux enfans, qui devaient être un jour des tyrans comme lui.

Un matin, il trouva son commensal tout préoccupé ; Malatesta lui demanda ce qu’il avait. Le jeune homme lui répondit qu’il venait de recevoir une lettre de son beau-père qui lui annonçait que la porte principale du baptistère de Pise était mise au concours, et qui l’invitait à venir concourir, honneur si grand, qu’au fond du cœur il s’en trouvait fort indigne. Malatesta encouragea fort le jeune homme à partir pour Florence ; puis, comme il comprit que le pauvre artiste était à sec d’argent, il lui donna une bourse pleine d’or pour l’aider à faire son voyage. C’était, comme on le voit, un excellent homme que cet exécrable tyran Malatesta.

Le jeune homme se mit en route pour Florence, à la fois plein d’espérances et de crainte. Le cœur lui battit fort, lorsque de loin il aperçut les tours et les clochers de sa ville