Mais il y a huit jours à peine que les Bourbons m’ont rendu ma principauté, et il n’y aurait vraiment pas assez de temps entre le bienfait et l’ingratitude. Si Votre Majesté le permet je continuerai donc ma route vers ma principauté, où j’attendrai ses ordres.
— Vous avez raison, Monaco, lui dit l’empereur, allez, allez ! seulement vous savez que votre ancienne place vous attend, je n’en disposerai pas.
— Je remercie mille fois Votre Majesté, répondit le prince.
L’empereur fit un signe, et l’on rendit au postillon ses chevaux qui avaient déjà mis en position une pièce de quatre.
Le postillon rattela ses chevaux. Mais tant que le prince fut à la portée de la vue de l’empereur, il ne voulut point remonter en voiture et marcha à pied.
Quant à Napoléon, il alla s’asseoir tout pensif sur un banc de bois à la porte d’une petite auberge, d’où il présida le débarquement.
Puis, quand le débarquement fut fini, comme il commençait à se faire tard, il décida qu’on n’irait pas plus loin ce jour-là, et qu’il passerait la nuit au bivouac.
En conséquence, il s’engagea dans une petite ruelle, et alla s’asseoir sous le troisième olivier à partir de la grande route. Ce fut là qu’il passa la première nuit de son retour en France.
Maintenant, si on veut le suivre dans sa marche victorieuse jusqu’à Paris, on n’a qu’à consulter le Moniteur. Pour guider nos lecteurs dans cette recherche historique, nous allons en donner un extrait assez curieux. On y trouvera la marche graduée de Napoléon vers Paris, avec la modification que son approche produisait dans les opinions du journal.
— L’anthropophage est sorti de son repaire.
— L’ogre de Corse vient de débarquer au golfe Juan.
— Le tigre est arrivé à Gap.
— Le monstre a couché à Grenoble.
— Le tyran a traversé Lyon.
— L’usurpateur a été vu à soixante lieues de la capitale.