Page:Dumas - Vingt ans après, 1846.djvu/215

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— Hein ! qu’ai-je vu là-bas ? dit d’Artagnan. — Vous êtes bien heureux si vous y voyez quelque chose par une pareille nuit, dit Porthos. — Des étincelles. — Moi aussi, dit Mousqueton, je les ai vues. — Ah ! ah ! les aurions-nous rejoints ? — Bon ! un cheval mort ! dit d’Artagnan en ramenant sa monture d’un écart qu’elle venait de faire ; il paraît qu’eux aussi sont au bout de leur haleine. — Il semble qu’on entend le bruit d’une troupe de cavaliers, dit Porthos penché sur la crinière de son cheval. — Impossible. — Ils sont nombreux. — Alors, c’est autre chose. — Encore un cheval ! dit Porthos. — Mort ? — Non, expirant. — Sellé ou dessellé ? — Sellé. — Ce sont eux, alors. — Courage ! nous les tenons. — Mais s’ils sont nombreux, dit Mousqueton, ce n’est pas nous qui les tenons, ce sont eux qui nous tiennent. — Bah ! dit d’Artagnan, ils nous croiront plus forts qu’eux, puisque nous les poursuivons ; alors ils prendront peur et se disperseront. — C’est sûr, dit Porthos. — Ah ! voyez-vous ? s’écria d’Artagnan. — Oui, encore des étincelles ; cette fois je les ai vues à mon tour, dit Porthos. — En avant, en avant ! dit d’Artagnan de sa voix stridente, et dans cinq minutes nous allons rire.

Et ils s’élancèrent de nouveau. Les chevaux, furieux de douleur et d’émulation, volaient sur la route sombre, au milieu de laquelle on commençait d’apercevoir une masse plus compacte et plus obscure que le reste de l’horizon.