Page:Dumas - Vingt ans après, 1846.djvu/332

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« Mon cher d’Herblay,

« J’apprends par d’Artagnan, qui m’embrasse de votre part et de celle du comte de la Fère, que vous partez pour une expédition qui durera peut-être deux ou trois mois : comme je sais que vous n’aimez pas demander à vos amis, moi je vous offre : voici deux cents pistoles dont vous pouvez disposer et que vous me rendrez quand l’occasion s’en présentera. Ne craignez pas de me gêner ; si j’ai besoin d’argent, j’en ferai venir de l’un de mes châteaux : rien qu’à Bracieux, j’ai vingt mille livres en or. Aussi, si je ne vous envoie pas plus, c’est que je crains que vous n’acceptiez pas une somme trop forte. Je m’adresse à vous, parce que vous savez que le comte de la Fère m’impose toujours un peu malgré moi, quoique je l’aime de tout mon cœur ; mais il est bien entendu que ce que j’offre à vous, je l’offre en même temps à lui.

« Je suis, comme vous n’en doutez pas, j’espère, votre bien dévoué,

« Du Vallon de Bracieux de Pierrefonds. »

— Eh bien ! dit Aramis, que dites-vous de cela ? — Je dis, mon cher d’Herblay, que c’est presque un sacrilége de douter de la Providence quand on a de tels amis. — Ainsi donc ? — Ainsi donc nous partageons les pistoles de Porthos comme nous avons partagé les louis de d’Artagnan.

Le partage fait à la lueur du rat de cave de Bazin, les deux amis se remirent en route. Un quart d’heure après, ils étaient à la porte Saint-Denis, où de Winter les attendait.