Page:Dumas fils - La Dame aux camélias, 1852.djvu/275

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qui ne reviennent à la surface que pour reprendre haleine.

Cependant je surprenais des moments de tristesse et quelquefois même des larmes chez Marguerite ; je lui demandais d’où venait ce chagrin subit, et elle me répondait :

— Notre amour n’est pas un amour ordinaire, mon cher Armand. Tu m’aimes comme si je n’avais jamais appartenu à personne, et je tremble que plus tard, te repentant de ton amour et me faisant un crime de mon passé, tu ne me forces à me rejeter dans l’existence au milieu de laquelle tu m’as prise. Songe que maintenant que j’ai goûté d’une nouvelle vie, je mourrais en reprenant l’autre. Dis-moi donc que tu ne me quitteras jamais.

— Je te le jure !

A ce mot, elle me regardait comme pour lire dans mes yeux si mon serment était sincère, puis elle se jetait dans mes bras, et cachant sa tête dans ma poitrine, elle me disait :

— C’est que tu ne sais pas combien je t’aime !

Un soir, nous étions accoudés sur le balcon de la fenêtre, nous regardions la lune qui semblait sortir difficilement de son lit de nuages, et nous écoutions le vent agitant bruyamment les arbres ; nous nous