Page:Dumas fils - La Dame aux camélias, 1852.djvu/62

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Disons seulement que tout le monde était d’une gaieté folle, et que parmi toutes celles qui se trouvaient là, beaucoup avaient connu la morte, et ne paraissaient pas s’en souvenir.

On riait fort ; les commissaires criaient à tue-tête ; les marchands qui avaient envahi les bancs disposés devant les tables de vente essayaient en vain d’imposer silence, pour faire leurs affaires tranquillement. Jamais réunion ne fut plus variée, plus bruyante.

Je me glissai humblement au milieu de ce tumulte attristant quand je songeais qu’il avait lieu près de la chambre où avait expiré la pauvre créature dont on vendait les meubles pour payer les dettes. Venu pour examiner plus que pour acheter, je regardais les figures des fournisseurs qui faisaient vendre, et dont les traits s’épanouissaient chaque fois qu’un objet arrivait à un prix qu’ils n’eussent pas espéré.

Honnêtes gens qui avaient spéculé sur la prostitution de cette femme, qui avaient gagné cent pour cent sur elle, qui avaient poursuivi de papiers timbrés les derniers moments de sa vie, et qui venaient après sa mort recueillir les fruits de leurs honorables calculs en même temps que les intérêts de leur honteux crédit.