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L’INCONNU

— Écoute, dit-elle, je t’aime à en mourir.

— Moi je t’aime, comme on dit que seul Satan peut inspirer l’Amour.

Elle se cachait le visage dans les mains.

— C’est, mon ami, que je suis damnée !

— Non ! fit-il, on n’est jamais damné.

Elle poussa un cri de joie :

— Tu le crois vraiment ?

— Certes ! ne dit-on pas que la miséricorde de Dieu est infinie.

— Ah ! dit-elle, aime-moi longtemps, je suis trop heureuse.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Les deux hommes armés de solides gourdins sortirent de la chaumière avec lenteur.

— Adieu ! fit doucement Babet.

Comme l’étranger, déjà en marche, se tournait vers elle, la femme sut encore deviner son visage ému. Elle lui tendit invisiblement ses deux mains en coupe où elle déposait de féroces et silencieux baisers.

Bientôt les voyageurs disparurent, et, au bout d’un temps assez long, Babet ne perçut plus le bruit de leur marche.

Le ciel était gris de cendre et semé d’étoiles. L’atmosphère tiède caressait sa figure et son corps, qui restait ému des tendresses de l’après-midi.