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LES MARCHANDS DE VOLUPTÉS


rendue, sans nulle excuse d’ailleurs. Personne au surplus ne croit à ces rencontres bizarres de faits, qui bouleversent parfois certaines existences. Cela semble vraiment par trop romanesque. C’est en effet un sentiment très affermi dans l’âme des citoyens que celui de la norme universelle. Bien entendu rien n’est si absurde et si stupide, mais les sociétés durent par cette continuité dans la certitude que l’honnête homme et le voleur ne se ressemblent point, ni leurs existences… C’est encore la raison pour laquelle les juges ne croient jamais à l’innocence de personne, et guillotineraient volontiers, si on ne les retenait pas, tous accusés coupables et innocents, pour tous délits, vrais ou imaginaires. En effet, à leurs yeux il n’y a que deux sortes d’événements : ceux qui arrivent, lesquels ont comme gabarit la logique, la raison et l’évidence, et ceux qui n’arrivent pas. Ces derniers se reconnaissent à leur étrangeté, à leur complication, et à leur apparence paradoxale. Ce sont eux qu’invoquent toujours les prétendus innocents. Par exemple, il n’arrive jamais ou il ne doit pas arriver qu’un homme riche soit coupable d’aucun délit. De même en cas de délit sexuel à deux, c’est la femme qui est obligatoirement le coupable. Enfin, quand un crime s’est effectué, être soupçonnable, c’est être coupable. Car, il serait attentatoire aux déférences dues à l’intelligence des