Page:Dunant - Un souvenir de Solférino, 1862.djvu/88

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érence entre amis et ennemis, « car, ajouta-t-elle, Notre Seigneur Jésus-Christ n’a point établi de pareilles distinctions entre les hommes lorsqu’il s’agit de leur faire du bien. » Quoiqu’il soit possible que les prisonniers de l’armée alliée aient d’abord été traités un peu rudement, ces rapports étaient certainement inexacts et exagérés, et en tout cas rien ne pouvait justifier de pareilles expressions.

Quant aux médecins français, non-seulement ils font tout ce qui leur est humainement possible, sans se préoccuper des nationalités, mais ils gémissent et s’affligent de ce qu’ils ne peuvent pas faire. Écoutons à cet égard le docteur Sonrier : « Je ne puis, dit-il, sans de profonds retours de tristesse, songer à une petite salle de vingt-cinq lits affectés, à Crémone, aux Autrichiens les plus gravement atteints. Je vois alors se dresser devant moi ces figures hâves, terreuses, au teint flétri par l’épuisement et une longue résorption purulente, implorant avec une pantomime accompagnée de cris déchirants, comme une grâce dernière, l’ablation d’un membre qu’on avait voulu conserver, pour aboutir à une lamentable agonie dont nous sommes demeurés les spectateurs impuissants !  »

L’Intendant général de Brescia et le docteur Gualla, directeur général des hôpitaux de cette ville, le docteur Commissetti, médecin en chef de l’armée sarde, et le docteur Carlo Cotta, inspecteur sanitaire de la Lombardie, rivalisèrent de dévouement et doivent être honorablement signalés après l’illustre baron Larrey, médecin-inspecteur en chef de l’armée française ; le docteur Isnard,